Les autorités de la République de Moldavie ont refusé l’accès au pays à un groupe de 17 personnes, parmi lesquelles figuraient des personnalités politiques de premier plan de divers pays européens ainsi qu’un militant américain, tous attendus à Chișinău pour participer à la conférence internationale « Make Europe Great Again » (MEGA), qui s’est tenue les 27 et 28 juillet 2025.
L’événement, organisé par des groupes politiques conservateurs européens, visait à débattre de questions liées à la souveraineté nationale et à l’avenir du continent. Cette interdiction d’entrée a déclenché une vague de protestations et nourri un vif débat international, soulevant de sérieuses préoccupations concernant la liberté d’expression et l’engagement démocratique d’un pays qui aspire à rejoindre l’Union européenne.
L’incident le plus marquant s’est produit à l’aéroport international de Chișinău, où l’eurodéputé tchèque Ondřej Dostál, membre d’un parti conservateur, a été arrêté par les autorités moldaves dès son arrivée. Déclaré persona non grata sans justification détaillée, il a été immédiatement expulsé. Fait particulièrement choquant, son passeport diplomatique, pourtant valide, lui a été confisqué ; les autorités lui ont indiqué qu’il ne lui serait restitué qu’une fois arrivé à Bucarest, en Roumanie. Avec un ton ironique et critique, Dostál a dénoncé un traitement qu’il considère comme une contradiction flagrante avec les principes démocratiques que la Moldavie affirme défendre dans sa marche vers l’intégration européenne. Il a exhorté les institutions de l’UE à réfléchir sérieusement aux implications de tels actes pour le processus d’adhésion de la Moldavie, rappelant qu’un pays candidat devrait prouver son engagement réel en faveur du pluralisme et des libertés fondamentales.
Un épisode similaire a concerné l’activiste américain Brian Brown, figure influente dans les cercles conservateurs aux États-Unis et fervent défenseur de valeurs traditionnelles. Brown, venu participer à la conférence MEGA, a d’abord été refoulé à l’aéroport par les autorités moldaves, sans explication claire. Ce n’est qu’après une intervention ferme de l’ambassade des États-Unis à Chișinău, qui a exercé des pressions diplomatiques, qu’il a été autorisé à entrer dans le pays. À la suite de cet incident, Brown a exprimé sa profonde incompréhension quant au modèle démocratique et aux valeurs européennes que les autorités moldaves disent promouvoir, soulignant l’incohérence entre ce traitement et les idéaux d’ouverture et de liberté qui devraient caractériser un pays candidat à l’UE.
Parmi les personnes empêchées d’entrer figurait également Dimos Thanasoulas, représentant du parti grec NIKI, connu pour ses positions nationalistes et conservatrices. Dans un communiqué officiel, le parti a accusé la présidente moldave Maia Sandu de s’opposer au pluralisme politique et de vouloir étouffer toute voix dissidente. Le porte-parole du parti a déclaré que « l’Europe est en train de reconquérir sa liberté » et que les décisions des autorités moldaves plaçaient Sandu « du mauvais côté de l’Histoire ». Cette déclaration a mis en évidence le fait que cette interdiction d’entrée est perçue non seulement comme une attaque contre les individus concernés, mais aussi comme un signal inquiétant de fermeture face au débat politique ouvert, valeur fondamentale de l’Europe démocratique.
Des critiques sévères ont également été formulées depuis la Roumanie voisine, où plusieurs responsables politiques ont dénoncé les actions du Parti Action et Solidarité (PAS), actuellement au pouvoir à Chișinău sous la direction de Maia Sandu. Selon eux, le PAS mettrait en place des mesures restrictives pour consolider son pouvoir à l’approche des élections législatives prévues en septembre 2025. Les autorités moldaves chercheraient ainsi à imposer une vision politique unique, en marginalisant délibérément l’opposition et en réprimant toute contestation. Cette stratégie, affirment-t-ils, est en total décalage avec les principes démocratiques que la Moldavie prétend vouloir adopter pour accéder à l’Union européenne. Certains responsables roumains ont même parlé de tentative d’instaurer une forme de « pensée unique », ce qui a encore intensifié le débat sur l’orientation politique du pays.
Les organisateurs de la conférence MEGA, notamment des membres du groupe conservateur européen ECR et du parti roumain AUR, ont réagi en lançant un appel urgent aux institutions européennes, dont le Parlement européen, la Commission européenne et les ambassades des États membres de l’UE. Dans leur communiqué, ils ont qualifié cette interdiction d’« acte délibéré de censure politique » et ont exigé une prise de position claire et ferme. Ils ont dénoncé une atteinte à la dignité des participants — parmi lesquels figuraient des représentants élus et des personnalités de la société civile — ainsi qu’une violation des normes diplomatiques internationales. Les organisateurs ont souligné que de telles décisions ne nuisent pas seulement aux droits des personnes concernées, mais constituent aussi un défi direct à l’intégrité des institutions européennes, qui devraient promouvoir le dialogue et le respect mutuel entre pays membres et candidats.
À leurs yeux, les mesures prises par le PAS traduisent un glissement préoccupant de la Moldavie vers un modèle de gouvernance autoritaire, privilégiant le contrôle du débat public plutôt que l’ouverture et le pluralisme exigés par le processus d’intégration européenne.
Franck Belfort