Ursula von der Leyen ne tombera pas, mais le débat promet d’être houleux. Trois jours avant le vote d’une motion de censure initiée par une partie de la droite nationaliste, la présidente de la Commission européenne sera confrontée ce lundi à une salve de critiques dans l’hémicycle de Strasbourg. Officiellement, la procédure n’a quasiment aucune chance d’aboutir : il faudrait réunir deux tiers des suffrages exprimés, une barre inatteignable dans le contexte actuel. Pourtant, le malaise politique est palpable.
La contestation porte sur plusieurs fronts. La gestion centralisée d’Ursula von der Leyen suscite de plus en plus de réticences jusque dans les rangs centristes et sociaux-démocrates. Le groupe Renew, emmené par la Française Valérie Hayer, accuse la Commission de court-circuiter le Parlement, comme récemment sur la menace de retrait d’une loi contre le greenwashing, en pleine négociation législative. Même au sein de la majorité pro-européenne, des fissures apparaissent quant à la méthode et au style de gouvernance de l’exécutif bruxellois.
Le texte déposé par l’eurodéputé roumain Gheorghe Piperea cible notamment le manque de transparence autour du « Pfizergate », l’affaire des SMS échangés entre von der Leyen et le PDG du laboratoire américain en pleine pandémie. À cela s’ajoutent des accusations plus larges : mauvaise gestion du plan de relance post-Covid, soupçons de financement d’ONG militantes pro-pacte vert, et interférences dans des processus électoraux nationaux comme en Roumanie. Autant de critiques qui, même si elles peinent à mobiliser massivement, cristallisent une défiance croissante envers Bruxelles.
Le PPE, le parti de la présidente, fait bloc derrière elle. Mais ce soutien de façade masque un débat plus profond sur les alliances futures au sein d’un Parlement européen où les rapports de force évoluent. La droite conservatrice italienne, bien qu’alliée du groupe ECR, garde ses distances avec cette motion, tout en restant attentive aux signaux politiques envoyés par Ursula von der Leyen. En toile de fond : la question taboue d’un éventuel rapprochement avec la droite identitaire, qui agite depuis des mois les cercles bruxellois.
Jamais une Commission n’a été renversée par le Parlement. Mais ce moment de tension illustre le trouble qui gagne l’UE, entre crise de légitimité démocratique et défiance croissante d’une partie des citoyens. Même si von der Leyen sort indemne du vote, sa position politique pourrait en sortir affaiblie, dans un contexte européen miné par les crises économiques, les tensions géopolitiques… et un fossé grandissant entre technocratie bruxelloise et opinion publique.
Voir aussi : Sur les traces du projet Von der Leyen, documentaire
