[Essai] Les Dépossédés : à la recherche du peuple perdu
Gilets Jaunes à Belfort
« Une gare, c’est un lieu où on croise les gens qui réussissent et les gens qui ne sont rien » disait Emmanuel Macron en 2017. Le choix de Christophe Guilluy, c’est justement de parler de ceux qui ne sont rien, les oubliés, dans son dernier ouvrage : Les Dépossédés.
Marguerite de Rubempré
2 novembre 2022 à 16:12
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Ils ont été chassés de partout : de la mer, de leurs régions, de leurs villes, du champ de l’acceptable. Depuis plusieurs décennies, on les force à la « résilience ». Cette France, c’est celle à qui parlent Fabien Roussel, François Ruffin et Marine Le Pen. Celle qui a été oubliée par les autres.
Cette « majorité ordinaire », Christophe Guilluy choisit de la décrire, d’expliquer pourquoi on ne l’entend plus. Alors qu’elle accédait à la mer grâce aux congés payés, les stations balnéaires l’ont confinée dans des campings. Alors qu’elle vivait tranquillement en ville après l’exode rural, l’explosion des prix du logement l’a remmenée à la campagne. Alors que l’éducation lui permettait d’accéder à la compréhension du monde, la technocratisation et la création d’un microcosme inclusif-exclusif l’a renvoyée vers son état originel. On pourrait multiplier les exemples à l'envi, de ces innombrables « dépossessions » que le peuple français subit cinquante ans.
Pour Guilluy, il y a deux classes populaires. Celle des Gilets Jaunes, et celle des « enclaves blédardes », sujet de ce cinéma hollywoodien qui ne représente rien d’autre que les fantasmes de la « bourgeoisie cool » qui vit à Paris, à Bordeaux et qui s’acharne par tous les moyens à mettre en œuvre son modèle électoral : « There is no majority ». Si le « peuple ordinaire » n’existe pas, si le monde est trop complexe et ne peut être compris que par les dirigeants, alors l’ascenseur social est mort, et les clivages auront tôt fait de vaincre le moindre élan populaire. Un des grands paradoxes de cette bourgeoisie est brillamment mis en lumière : son inclusivité est sélective, et se traduit par l’exclusion de l’antique classe populaire.
La grande force de cet essai, c’est qu’il ne s’arrête pas à ce constat. La fin de l’ouvrage est ainsi dédiée à une perspective plutôt originale : l’espoir. Face aux discours déclinistes qui composent l’immense majorité de ce type d’essais, Dépossession voit un futur possible. Sans naïveté, …
Marguerite de Rubempré
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