Le Japon traverse une période d’incertitude politique sans précédent depuis deux décennies. L’effondrement de la coalition au pouvoir, dominée depuis 1999 par le Parti libéral-démocrate (PLD), plonge le pays dans une instabilité qui inquiète les marchés financiers : l’indice Nikkei a chuté de plus de 2,5 % mardi 14 octobre. Au cœur de la tourmente, la nomination de Sanae Takaichi, cheffe du PLD, fait l’objet d’une opposition grandissante.
Une alliance inédite entre le centre droit, la gauche et la droite populiste pourrait se former pour contrer son accession au poste de Première ministre. Les dirigeants du Parti démocrate du peuple (PDP), du Parti démocrate constitutionnel (PDC) et du Parti de l’innovation du Japon cherchent à s’accorder sur un candidat commun, probablement Yuichiro Tamaki, chef du PDP. Les négociations portent sur deux sujets hautement sensibles : la politique nucléaire et la défense nationale. Le PDC, farouchement opposé à l’énergie atomique et attaché à la doctrine pacifiste d’après-guerre, s’oppose frontalement à ses futurs alliés potentiels.
Cette tentative de coalition reste fragile et pourrait se briser sur des désaccords idéologiques. En cas d’échec, Sanae Takaichi, connue pour ses positions ultranationalistes et sa proximité avec le courant conservateur nippon, pourrait tout de même accéder au pouvoir. Mais elle devrait alors composer avec deux Chambres fragmentées et hostiles. Son élection, qui ferait d’elle la première femme à diriger le Japon, serait aussi synonyme d’un virage politique marqué : défense renforcée, indépendance stratégique vis-à-vis des États-Unis, et relance du nucléaire civil.
Le retrait du parti centriste Komeito, partenaire historique du PLD, a aggravé la crise. Son chef, Tetsuo Saito, a justifié la rupture par le manque de transparence du PLD après un scandale financier lié à des caisses noires. Cette défection fragilise la droite japonaise et laisse planer le risque d’un vide politique prolongé.
Alors que le Japon s’enfonce dans le doute, la scène politique se redessine dans la confusion. Si Sanae Takaichi parvient à s’imposer malgré tout, ce sera au prix d’un isolement inédit. Mais si la coalition d’opposition réussit, le pays connaîtra sa première alternance depuis plus d’une décennie, et peut-être un tournant historique dans son rapport au pouvoir conservateur.