L’Égypte à l’aube d’une nouvelle crise alimentaire
Une bannière du président égyptien Abdel-Fattah el-Sissi avec le slogan "Vive Egypte", au Caire, en Égypte, jeudi 12 janvier 2023. L'Égypte continue de lutter contre une inflation galopante dans un contexte de chute spectaculaire de sa monnaie, alors que de nombreux Égyptiens sont confrontés à des hausses de prix
Sortie exsangue de l’année 2022, l’Égypte replonge la tête en 2023 dans le cercle vicieux de l’inflation. Il n’y a pas de hasard : premier importateur mondial de blé avant la guerre en Ukraine, le pays était très dépendant de ses importations russes et ukrainiennes. Depuis mars 2022, la situation alimentaire de la population est alarmante. Le gouvernement peine à trouver des solutions. La colère gronde.
Mayeul Chemilly
18 janvier 2023 à 18:03
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« Il faut faire ses courses maintenant ! » Tel est le mot d’ordre qui circule depuis quelques jours dans les rues du Caire. La livre égyptienne vient de connaître une nouvelle dépréciation. Le 10 janvier, la parité était de 27 livres pour un dollar, contre 29 livres mercredi 18 janvier. Une nouvelle inflation des prix des produits de bases devrait suivre mécaniquement. Pour la population, il s’agit d’anticiper. Mi-janvier, le kilo de farine valait 150 livres, soit 4,68 euros contre 1 à 1,50 euro en France.
La conjoncture économique désastreuse que connaît l’Égypte en ce début d’année 2023 repose sur sa dépendance structurelle aux importations et sur les choix politiques inadaptés à la crise. Commençons par préciser que le pays compte quelque 105 millions d’habitants dont 30% vivaient sous le seuil de pauvreté en 2019/2020[1]. La guerre en Ukraine ayant pour corollaire l’augmentation des prix des céréales, cette proportion atteint 60%, selon les chiffres de la Banque Mondiale relayés par Le Monde[2]. L’Égypte importe massivement son blé. C’est même le plus gros importateur mondial, avec 12 millions de tonnes par an. Les importations en blé dépendaient avant le début du conflit à 61 % de la Russie et à 23 % de l'Ukraine[3]. L'approvisionnement dégradé depuis mars 2022 superpose une crise structurelle aux crises conjoncturelles et politique qui affaiblissent le pays depuis plusieurs années.
Le blé est notamment vendu via le système des cartes de rationnement, qui permet à maintenant 70 millions d’Égyptiens d’avoir accès aux prix subventionnés du pain. Avant crise, un Égyptien sur trois avait accès aux prix subventionnés. C’est désormais plus d’un sur deux. Pour prévenir les pénuries, les magasins limitent les quantités disponibles à l’achat. De plus, début août, le président Abdel Fattah al-Sissi s’est risqué à augmenter le prix des produits subventionnés, augmentant encore les difficultés de sa population. En décembre, le Conseil national de l’alimentation …
Mayeul Chemilly
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