Société

JO 2024 : les sans-abris sont priés d’aller faire un tour en province

En vue des Jeux Olympiques de 2024, l’État a lancé depuis la mi-mars un plan de relocalisation des migrants et sans domicile fixe installés en région parisienne vers le reste du territoire français. Ce plan concerne toutes les régions sauf la Corse et les Hauts-de-France. Olivier Klein, ministre du Logement a déclaré, mardi dernier devant l’Assemblée nationale que cette décision du gouvernement, piloté par le ministère de l’Intérieur, était motivé par la récalcitrance des hôteliers franciliens à accueillir les demandeurs d’asile et autres sans-papiers en vue des prochains évènements sportifs qui auront lieux à Paris. Pour organiser l’évacuation de tous ces sans domicile fixe, l’exécutif a demandé aux préfets leur déplacement en province via différents programmes plus ou moins imposés appelés autrement « sas d’accueil temporaires régionaux ». Dans les Pyrénées-Atlantiques, par exemple, le préfet a lancé un appel à projet pour reloger 50 immigrés sur la base du volontariat, comme le montre ce document, publié au recueil des actes administratifs en fin février 2023. Ces « sas » sont censés les accueillir provisoirement pour une durée de trois semaines, avant de leur permettre d'être relogés dans un centre d’accueil. Néanmoins, la création de ces « sas » ne sont pas tous basés sur la base du volontariat, comme la création de l’un d’entre eux dans la commune de Bruz près de Rennes. Le maire divers gauche de cette petite ville de 18 000 habitants a d’ailleurs fait part de son mécontentement. Le terrain choisi longerait une voie ferrée et a déclaré qu’il était « pollué par des hydrocarbures et des métaux lourds ».

L’efficacité du plan mis en doute

Malgré les justifications d’Olivier Klein citées plus haut, la raison de ce plan serait plutôt de montrer la plus belle image possible de Paris, et donc de la France, en cachant la misère humaine aux yeux de ces riches touristes qui auront l’occasion de venir ici pour assister à ce spectacle dont le prix fait polémique. Néanmoins, l’on peut douter des résultats espérés de ce plan. Comme le montre ce rapport parlementaire « sur les migrations, les déplacements de populations et les conditions de vie et d’accès au droit des migrants, réfugiés et apatrides en regard des engagements nationaux, européens et internationaux de la France » publié en 2021, la dernière fois que le gouvernement a tenté de relocaliser des demandeurs d’asile en région, un quart de ces derniers ont refusé d’être relocalisés, d’autres sont tout simplement revenus en île-de-France sans que l’on sache précisément leur nombre exact. Selon un rapport de l’INSEE de mars 2023, il y aurait près de 7 millions d’immigrés en France dont une importante proportion se trouverait dans la région parisienne. Tous ne sont pas des sans-abris, loin s'en faut, mais au vu de ces faits, on peut douter de la capacité de l’État à débarrasser Paris de toutes ces tentes Quechua qui inondent le périphérique parisien au nord de la ville.

 Quelles conséquences pour les territoires

L’accueil de ces migrants sur les territoires est par ailleurs loin d’être toujours bien accueillis par les populations riveraines, comme l’ont montré les exemples de Saint-Brévin et Callac. Si le directeur de l’Office français de l’immigration et de l’intégration considère que les évènements de Saint-Brevin furent un « épiphénomène », au regard de l'ampleur de ce nouveau plan, les risques de mouvements de protestation localisé sont élevés. D’autant que Gérald Darmanin, ministre de l'Intérieur, a avoué que l’État n’avait pas les moyens d’assurer la protection des élus locaux. Or, les citoyens en colère qui refusent d’être les victimes d’un plan de communication digne de Tintin au pays de Soviet risquent bien d'en donner du fil à retordre à leurs élus. 

Julien Lusinchi

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