Drones : avec la fibre optique, les Russes ont repris l’avantage

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C’était en novembre dernier, à Koursk. Vladimir, 22 ans, considérait que les Ukrainiens avaient encore une avance considérable dans la maitrise et l’usage des drones.

Le jeune soldat russe considérait ses adversaires comme pionniers dans l’avènement de cette nouvelle arme sur le champ de bataille et n’avait aucun mal à le dire. À l’époque, son chef Sergei Munier, un franco-ukrainien créateur de l’unité « Normandie-Niemen », vétéran du Donbass et ancien réserviste de l’armée française, nous avouait, lui, ne pas faire usage de drones à fibre optique. C’était il y a six mois. Autant dire, dans la guerre des drones, une éternité. Depuis, ces deux réalités de la guerre ont changé.

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Le drone, c’était déjà le cas, a pris l’ascendant au point que tout ce qui roule à moins de cinq kilomètres de la ligne de front peut être considéré comme détruit dans un délai très court, à moins de dix kilomètres en danger, et au-delà, les drones kamikazes frappent de 15 à 20 kilomètres de distance. À l’époque où nous avions rencontré Sergei et Vladimir, ils envoyaient des drones sur des stations-services situées dans la périphérie de Soudja, le fief des Ukrainiens à Koursk, depuis une ligne d’arbres située à 20 kilomètres de l’objectif.

Les Russes ont désormais pris l’ascendant dans ce domaine, mettant en péril l’usage défensif des drones FPV qui, jusqu’ici, avait permis à l’Ukraine de résister en contrant les offensives des Russes. L’usage du drone à fibre optique s’est généralisé. Les Russes devancent leurs adversaires dans la capacité à produire ces drones de moyenne distance. Ceux-ci font tout ce qu’ils peuvent pour combler leur retard. Présent avec les Ukrainiens sur le front de Kostiantynivka près de Pokrovsk, le reporter du Times, Anthony Loyd, a constaté que « souvent insensibles au brouillage, la nouvelle génération de drones FPV russes de moyenne portée, produits en série, comme le Molniya-1, et leurs équivalents FPV à fibre optique, tuent non seulement des soldats et des civils ukrainiens loin du front, mais modifient également la configuration physique de la ligne de front, les tactiques de guerre et la psychologie des soldats qui y combattent. Ils ont également un impact dévastateur sur les capacités logistiques de l’Ukraine. »

La révolution des drones en Ukraine ne date pas d’hier. Ainsi, en 2024, cette arme a tué plus de soldats des deux côtés de la ligne de front que n’importe quel autre armement. Mais 2025 a sonné l’avènement du drone à fibre optique. La version russe est un « quadcopter » dont la batterie d’une durée plus longue que les autres FVP est située sur la partie supérieure et la munition en dessous. Le gros avantage du drone à fibre optique est qu’il est insensible au brouillage de l’adversaire car il est relié à son pilote directement par une fibre. Il est en outre très mobile et dispose d’une caméra bien plus précise qui permet de détecter le soldat sous une tente ou de pénétrer une fortification ou même l’intérieur d’un blindé à la recherche de soldats à tuer.

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La multiplication de l’usage de ce type de drones a eu pour conséquence d’agrandir ce qu’on appelle la zone grise, partie qui se situe entre les lignes tenues par les adversaires jusqu’à 7 kilomètres, ce qui a pour conséquence de provoquer des séjours plus longs pour les soldats sur la ligne de front en compliquant leurs mouvements pour s’y rendre ou en sortir. Ainsi, autrefois (je parle d’il y a deux ans), pendant la « raspoutitsa », la période des boues entre les saisons et même en temps ordinaire, les soldats étaient convoyés, même pendant la journée, je l’ai constaté, juchés sur les véhicules de transport de troupes. Ils n’accomplissaient à pied que les quelques dernières centaines de mètres. Une telle configuration est aujourd’hui impossible. Les soldats doivent se résoudre à monter au front à bord de pickups (seuls véhicules suffisamment rapides pour semer un drone) et à effectuer leurs rotations à pied et de nuit sur plusieurs kilomètres. L’usage du quad ou de la moto s’est également développé considérablement, y compris lors des assauts. De même, l’évacuation des blessés a été rendue très pénible pour les mêmes raisons. Dernière conséquence : les unités combattantes sont devenues réticentes à prendre des médias avec eux, en raison de ces nouvelles contraintes. Le front ukrainien de haute intensité était déjà compliqué pour les journalistes, nous en savons quelque chose chez OMERTA. Il vire désormais au cauchemar.

OMERTA n°8

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