Masud Boulos, conseiller du président américain pour l’Afrique et le Moyen-Orient, a indiqué que l’armée soudanaise et les Forces de soutien rapide (RSF) s’apprêteraient à engager des pourparlers directs afin de mettre fin à un conflit qui dure depuis plus de deux ans, qualifié par lui de « l’une des pires crises humanitaires au monde ».
Lors d’une réunion de l’Assemblée générale des Nations unies à New York, Boulos a précisé que Washington discutait avec les deux parties pour définir des principes de négociation, exprimant l’espoir d’un progrès prochain.
Dans le même temps, la « Quadripartite » (États-Unis, Émirats arabes unis, Arabie saoudite, Égypte) a tenu une réunion à New York, soulignant la nécessité de mettre fin au conflit, de restaurer la paix et de répondre aux besoins humanitaires urgents du peuple soudanais.
Un début de soulagement humanitaire à Darfour
Le mouvement « Fondation du Soudan » (« Tasis ») a annoncé avoir facilité l’acheminement de camions d’aide humanitaire vers la ville de El-Fashir, capitale du Darfour, assiégée et secouée par de violents affrontements depuis plusieurs semaines.
Cette initiative intervient alors que des dizaines de milliers de civils fuient chaque jour la violence. Bien que des zones sûres aient été mises en place par le mouvement et que les habitants aient été invités à s’y rendre, l’armée soudanaise tente d’empêcher leur départ.
Selon les estimations de l’ONU, plus de 400 000 personnes auraient déjà quitté El-Fashir et les zones avoisinantes pour se diriger vers le mont Marrah et Tawila, alors que les services de santé s’effondrent et que des maladies comme le choléra et le paludisme se propagent.
Appels à des enquêtes pour usage d’armes chimiques
Dans un développement préoccupant, des organisations de défense des droits humains, menées par le « Sudanese Alliance for Rights » et des avocats internationaux, ont demandé l’ouverture d’une enquête internationale et la mise en cause de responsables gouvernementaux après des rapports américains faisant état de l’utilisation d’armes chimiques par l’armée soudanaise en 2024.
Les plaintes visent notamment le chef de l’armée Abdel Fattah al-Burhan, son adjoint Yasser al-Atta ainsi que Shams Eddine El-Kabbashi et le général Taher Mohamed.
Une plainte a également été déposée auprès de la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples, ainsi qu’auprès du président de l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques, demandant l’ouverture d’enquêtes et le gel de l’adhésion de l’autorité de Port-Soudan.
En mai dernier, le département d’État américain avait dénoncé « une violation grave » par l’armée soudanaise de la Convention sur les armes chimiques, ce qui pourrait entraîner des mesures internationales, y compris une saisine du Conseil de sécurité.
Des preuves de l’usage d’armes interdites
Des rapports et vidéos sur le terrain ont documenté l’utilisation par l’armée soudanaise de munitions suspectées de contenir des substances toxiques, notamment dans la région d’Al-Kouma, à l’ouest du Darfour, où des cas d’asphyxie massive et de fausses couches ont été signalés.
Des vidéos montraient des soldats portant des masques protecteurs et tirant des projectiles supposés contenir du gaz moutarde, ce qui a conduit Washington à imposer des sanctions contre l’armée soudanaise en mai.
Réactions locales
Le mouvement « Samoud » a salué les déclarations américaines sur la perspective de négociations, y voyant une opportunité de mettre fin aux violences et de panser les plaies de millions de Soudanais. Son leader, Khaled Omar Youssef, a appelé à soutenir le processus pacifique et mis en garde contre les tentatives de certains acteurs internes, notamment des éléments liés à l’ancien Parti national, visant à saboter l’initiative.
Alors que se dessinent des signes d’apaisement politique et que des enquêtes internationales sur des violations graves sont en cours, le Soudan se trouve à un tournant décisif : soit les efforts internationaux et locaux réussiront à arrêter la guerre, soit la crise continuera à emporter des vies et à détruire ce qu’il reste des infrastructures humanitaires du pays.
Franck Belfort